Tecindustry Magazine « Nous voulons réformer le marché de l’art »

« Nous voulons réformer le marché de l’art »

Fort esprit d’innovation et grande passion : chaque année, environ 400 start-up voient le jour en Suisse. D’où viennent les idées ? Qu’est-ce qui leur donne leur envol ? Nous avons interrogé des fondatrices et fondateurs prometteurs de la branche tech. Épisode 2 : De véritables œuvres d’art.

Marie Didier, avec votre start-up MATIS vous avez développé une solution qui aide les spécialistes dans l’authentification de tableaux. Quel problème votre idée résout-elle ?

Marie Didier : Les peintures cachent de nombreuses informations qui ne sont pas visibles à l’œil nu. Notre appareil photo enregistre les couches, collecte les données, les analyse et les codifie. Nous détectons par exemple les dommages et donnons une évaluation de la nature et de l’état de l’œuvre. Cela peut aider lors de la restauration et donne plus de sécurité pour les acheteurs d’une œuvre d’art. Je veux vraiment faire bouger le monde de l’art et équiper les experts, les institutions et les musées de mon outil de diagnostic rapide.

Quelle est la nouveauté de votre idée ?

Notre technologie permet une interprétation rapide et simple des informations cachées dans les tableaux. Les technologies traditionnelles chauffent et éclairent les œuvres avec des spots halogènes. Grâce à notre caméra multispectrale et à un algorithme de traitement de l’image, il suffit d’un clic, nous ne chauffons ni n’éclairons - ce qui ménage les œuvres d’art. Les données sont cryptées, mais peuvent nous fournir rapidement des informations. Nous observons donc l’art avec la technologie, l’innovation et la science.

 

Comment avez-vous fait pour savoir si votre idée était bonne ?

Le fait de commercialiser des idées et des technologies représente souvent un défi important. Je travaille dans le domaine des technologies artistiques depuis plus de quinze ans et je savais qu’il existait un besoin dans ce domaine. Je voyais de plus en plus l’intérêt d’utiliser la haute technologie pour étudier l’art. En guise de test, mon équipe et moi avons ensuite parlé à quelque 300 utilisateurs potentiels pendant deux ans et leur avons fait remplir de nombreux questionnaires. Ceci nous a permis d’être sûrs que nous connaissons les besoins de chacun. En tout cas, l’effort en valait la peine. Nous avons ainsi recueilli de nombreuses informations.

Qu’est-ce qui a permis de concrétiser cette idée ?

Bonne question : tu as l’idée, le marché - et après ? Il faut de l’argent, des compétences, du personnel. En plus de mon travail, j’ai suivi un cours chez Innosuisse pour savoir comment créer une start-up. J’y ai rencontré par hasard une femme qui travaille désormais avec moi. Par chance, le CSEM, le Swiss Center for Electronics and Microtechnology, s’est intéressé à mon idée pour son programme « Postdoc for Industry ». On m’a demandé d’élaborer en deux ans un prototype et de présenter une conception d’une entreprise en y intégrant les connaissances en microélectronique et en optique acquises en même temps au CSEM. J’ai accepté le poste en pensant qu’après ces deux années, je pourrais être indépendante avec une équipe, un produit et un plan. Avec succès : en 2024, nous irons sur le marché.

Comment avez-vous assuré le financement ?

Ce qui nous aide à être indépendants et à grandir, ce sont par exemple les moyens financiers de Venture Kick, du prix d’innovation BCN, de la Fondation pour l’innovation technologique STI ou du canton de Neuchâtel. Nous avons donc remporté plusieurs prix avec des récompenses. Bien sûr, le CSEM nous aide aussi. Nous poursuivons notre collaboration sur des projets communs et des coopérations. De plus, nous sommes soutenus financièrement par une entreprise qui croit en nous. Tout cela demande beaucoup d’engagement de notre part. Il faut sortir avec son idée pour que d’autres puissent la connaître et y croire aussi.

Il faut sortir avec son idée pour que d’autres puissent la connaître et y croire aussi.

Marie Didier, fondatrice de MATIS

La branche tech en Suisse est-elle favorable aux start-up ?

Oui, on reçoit beaucoup d’aide avant le lancement et il y a des prix à gagner pour les bonnes idées. Mais ensuite, les choses se compliquent. Nous traversons actuellement la « Vallée de la mort » : nous ne sommes plus tout à fait en avance et pas encore établis et matures non plus. Une situation qu’il faut alors gérer soi-même.

Vous êtes vous-même peintre et experte technique. Qu’est-ce que ça fait d’être soudain fondatrice ?

J’ai longtemps été impliquée dans de nombreuses organisations et fondations différentes. Je connais donc déjà un peu ce côté. Mais j’apprends tous les jours. Ce n’est pas quelque chose qui m’est tombé dessus. Mais comme toujours : si tu veux réussir dans ce domaine, tu dois acquérir des connaissances, apprendre auprès d’experts et t’accrocher.

À quoi devrait ressembler une équipe fondatrice ?

Aujourd’hui, nous sommes quatre dans l’équipe. Il faut des gens passionnés qui croient très fort en ce projet. Chacun devrait être employé là où il ou elle a ses points forts. Tout le reste doit être compensé ou externalisé. L’équipe doit également s’intéresser aux clients potentiels. Nous sommes constamment en contact et ne développons pas simplement quelque chose en cachette. Dans le domaine de la technologie, pratiquement tout est possible au niveau du développement. Les possibilités sont infinies. Le défi consiste à développer ce qui convient au marché.

Quels sont les défis majeurs pour vous ?

Expliquer à mon équipe et à d’autres partenaires, de manière simple et claire, les idées que j’ai en tête. La communication constitue un défi important.

Dans le domaine de la technologie, pratiquement tout est possible au niveau du développement. Le défi consiste à développer ce qui convient au marché.

Marie Didier, Founder bei MATIS

Refondriez-vous votre start-up ?

Absolument. Créer une start-up comporte des risques et ce n’est pas tous les jours facile. C’est un défi et en même temps ma passion. On obtient aussi beaucoup de liberté en n’étant pas salarié. Bien sûr, avec le recul, je ferais certaines choses différemment.

Quoi par exemple ?

Je n’ai rien de précis en tête. Mais avant tout les tâches administratives ou d’aspects juridiques. J’ai souvent agi comme je le pensais et je n’ai pas toujours mesuré la portée de mes actes. Mais je tire des enseignements de mes expériences, tout comme de la fréquentation de personnes de valeur que je rencontre. 

Votre conseil à d’autres fondateurs d’entreprise ?

Dormez bien ! (rires) Sinon : faire confiance aux bonnes personnes et continuer sans perdre sa passion. Et s’il y a quelque chose que vous ne comprenez pas : demander ouvertement. On peut tout apprendre.

Affiliation à Swissmem à prix réduit

Swissmem propose aux start-up de l’industrie tech une affiliation à prix réduit durant les 5 premières années après leur fondation. Les membres de Swissmem profitent entre autres d’une large palette de conseils et ont accès à un vaste réseau de clients et partenaires potentiels.

Pour de plus amples informations, veuillez contacter Monsieur Adam Gontarz : a.gontarznoSpam@swissmem.ch.

 

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Dernière mise à jour: 02.05.2023